Rozi Plain
En quatre albums, les chansons hypnotiques et doucement décalées de Rozi Plain ont fait leur petit bonhomme de chemin depuis Winchester, sa ville natale, jusqu’à l’épicentre créatif de Londres, en passant par Bristol et son inventivité bouillonnante. Témoignant d’une ouverture croissante sur le monde à mesure que les tournées se multipliaient, chaque album a su aborder de nouveaux territoires sonores tout en conservant un caractère intimiste et chaleureux. Sur Prize, son cinquième album, dont la sortie est prévue chez Memphis Industries le 13 janvier 2023, l’approche unique et pleine de sincérité de Rozi est toujours première, faisant d’elle l’une des artistes britanniques les plus novatrices et les plus attachantes.
Il y a un son Rozi, et en son cœur une soif de simplicité, un irrépressible besoin de revenir à l’essence des choses afin d’en révéler la beauté fondamentale. Sur le titre « Prove Your Good », elle pose directement la question :
Que voulons-nous ?
MOINS
Voulez-vous plus ?
OUI
(What do we want?
LESS
Do you want more?
YES)
Cette ambivalence infuse avec subtilité l’ensemble de son œuvre, grâce à son chant et à ses mélodies caractéristiques. Rozi utilise sa voix singulière et naturelle, s’accompagnant d’une guitare électrique qu’elle a fabriquée elle-même. Ces arpèges envoûtants et percutants à la complexité tranquille nous attirent, tout en laissant de la place à la réflexion et à la collaboration.
Sur Prize, Rozi a réuni son équipe de musiciens la plus large afin de créer un album qui préserve son style guitare-voix intimiste, tout en accentuant ces moments de calme et d’émotion explosive, au centre d’un esprit collectif en surplomb. De la béatitude émanant des paroles de Kate Stables (This Is The Kit) sur « Agreeing For Two », au chant en appel et réponse de « Prove Your Good », tout en passant par l’instrumentation vaste et les arrangements ornementaux coordonnés de « Help » et « Sore », ou encore les explorations festives au synthé de « Painted The Room » et le jazz vaporeux de « Spot Thirteen », une sensation de convivialité, jusqu’au fait même de se réunir, imprègne les dix pistes de l’album.
Le calendrier des tournées de Rozi pour la promotion de son précédent album, What A Boost, touchait à sa fin lorsque le monde s’est retrouvé confiné. Après avoir enregistré un EP composé de nouveaux morceaux lors d’une retraite avec Jamie et Gerard dans le cadre des résidences Lost Map sur l’île d’Eigg, Rozi a continué à écrire et à enregistrer d’autres démos à divers endroits en 2020 et 2021. Ces sessions ont formé la base de Prize, et lorsque le monde s’est ouvert à nouveau, le groupe d’amis a navigué en ferry durant 24 heures de Portsmouth à Bilbao en octobre 2021, pour se rendre au Pays basque français, et enregistrer les chansons au studio Shorebreaker. Revigoré, le groupe a rapporté ces enregistrements à la maison et les membres ont commencé le processus de montage et d’overdubbing au Total Refreshment Centre et chez eux à Londres, Bristol et Glasgow. Avec Rozi et Jamie Whitby Coles à la production, le groupe est retourné à Margate pour travailler au mixage avec Ash Workman (Christine and the Queens / Metronomy).
Sur Prize, les rythmes apaisants et intensément groovy de Jamie Whitby Coles apportent de la constance, tout en prenant à l’occasion des virages inattendus sur les contretemps. Les lignes de basse ondulantes d’Amaury Ranger se faufilent partout ; sans jamais dominer, elles offrent plutôt un chemin rassurant en de chaleureux territoires.
De même, le jeu de synthé de Gerard est le parfait contrepoint à la retenue discrète mais ardente de Rozi. Il bouillonne et siffle avec délicatesse sur « Help », réfléchi par les ornements élégiaques du saxophone de Cole Pulice et la harpe de Serafina Steer, de Bas Jan. Sur « Painted The Room », les éléments électroniques sont poussés plus loin grâce à la contribution de Danalogue (Comet Is Coming / Soccer 96), jusqu’à obtenir une onde sinusoïdale d’oscillation pour une fête d’anniversaire.
Puis vient « Sore », et ses paroles à nu (accompagnées par Yoshino Shigihara, de Yama Warashi), recouvertes d’un mur de cordes que l’on doit à Emma Smith (Bas Jan / JARV IS), et et par le saxophone à couper le souffle d’Alabaster dePlume. C’est terminé en trois minutes, et c’est d’autant plus dévastateur.
« Il fallait le manger, alors tu l’as mangé » (“It need eating so you ate it”), chante Rozi dans « Complicated », une chanson qui parle d’accepter ses complexes et de s’autoriser à accueillir les succès. Dans ce nouvel album, c’est le sens du groupe instillé entre les collaborateurs qui est la véritable récompense ; chaque élément individuel de chaque morceau est au service de la chanson, sans que rien ne soit perdu.