Şatellites

Aylar

Sortie le 07 mars 2025

Batov Records

Les Şatellites reviennent en orbite avec Aylar et proposent une évolution audacieuse de leur son folk-meets-groove psychédélique établi sur leur premier album.

 

Fortement influencé par la vague de rock psychédélique fusionné à la musique folk traditionnelle qui a déferlé sur la Turquie dans les années 60 et 70, le premier album éponyme du groupe a été acclamé dans le monde entier. Le disque a été soutenu par des stations telles que BBC Radio 6 Music et FIP en France, et le groupe a été invité à enregistrer des concerts pour Worldwide FM, l’émission de Gilles Peterson, et KEXP à Seattle.

 

Depuis leurs débuts, les Şatellites sont passés d’un projet de studio à un groupe de tournée à part entière. Au fil du temps, ils ont changé de composition pour leur permettre de recréer en direct le son qu’il avait en studio. Le groupe comprend désormais Tsuf Mishali au clavier et aux synthés, connu pour son travail dans des groupes de musique psychédélique et Tal Eyal aux percussions. Rotem Bahar est devenue la chanteuse à plein temps, ajoutant une touche plus pleine et plus grinçante au son du groupe. Derrière la batterie, Lotan Yaish apporte une énergie dynamique à la section rythmique.

 

Aylar (‘lunes’ ou ‘mois’ en turc) est ainsi le fruit de deux ans de tournée d’un groupe plus soudé et revigoré que jamais. Il présente des arrangements plus ambitieux, des compositions plus longues, des harmonies complexes et des rebondissements inattendus, reflétant l’engagement d’un groupe en faveur de l’innovation et sa passion pour la vague originale de la musique psychédélique turque.

 

‘Tisladi Mehmet Emmi’ est le morceau d’ouverture de l’album et sert de porte d’entrée à leur son élargi. Cette réimagination d’une chanson folklorique turque traditionnelle (Türküler) du prolifique chanteur-poète Aşık Ali Doğan, qui joue du saz, la transforme en un chef-d’œuvre de funk psychédélique moderne. Le saz de Kluger et les synthés de Mishali s’entremêlent sans heurt, soutenus par les lignes de basse contagieuses d’Ariele Harrosh et la batterie dramatique de Yaish, le tout culminant dans la voix rauque et émotive de Rotem Bahar. Sur le plan lyrique, le morceau raconte l’histoire de deux hommes âgés qui se lamentent sur l’état du monde – un thème intemporel.

 

L’une des plus grandes surprises de l’album, ‘Midnight Sweat’, met en exergue une facette plus sombre et sulfureuse du groupe. La voix nous livre une berceuse de fin de soirée sur un groove disco-rock. Développée en collaboration, la chanson a commencé par une esquisse du bassiste Ariel Harrosh, avant qu’Itamar n’ajoute une mélodie et que Rotem Bahar ne rédige les paroles en turc. La chanson raconte une histoire d’amour passionnée, ponctuée d’images sensuelles.

 

‘Hot Jazz’ s’aventure en territoire cinématographique, tandis que le groupe déploie ses talents en matière de jazz et de funk. Le groove percutant est parfait pour les breakdancers. Les riffs de bağlama et de flûte, imprégnés de gammes mineures et de nuances modales, confèrent au morceau un caractère moyen-oriental typique. Ailleurs, Aylar propose des morceaux de bravoure qui remodèlent les genres, comme ‘Gizli Ajan’, qui s’ouvre sur une introduction percussive rappelant ‘Bongolia’ de l’Incredible Bongo Band. Ce morceau instrumental est devenu l’un des préférés des fans. ‘Yok Yok’ réinterprète un classique d’Erkin Koray sur une touche punk-rock teintée de prog, passant par quatre sections distinctes avant de s’achever sur un rythme zeybek 9/8 endiablé. La reprise la plus ambitieuse de l’album est leur interprétation folk-funk cosmique de la ballade ‘Ikmiz Bir Fideniz’ de Hakki Bullut, suivie de l’instrumental original ‘Beş Kardeş’ (‘Cinq frères’), un morceau à 5/4 mené par le bağlama trempé dans la réverb d’Itamar. L’album se clôt sur un duo dynamique, ‘Zülüf Dökülmüs Yüze’, une version disco-fuzz cosmodélique d’un Türküler classique de Neşet Ertaş, et ‘Zülüf B (Reprised)’, qui déconstruit et réassemble le groove. Débutant sur un rythme proto-métallique inquiétant, le morceau se développe jusqu’à un final dramatique, au tempo soutenu.

 

Si le premier album de Şatellites a posé les jalons de leur son, Aylar marque leur transformation en une force où la musique se réalise pleinement. Avec cet album, Şatellites sort plein d’assurance de l’ombre de leurs héros psychédéliques anatoliens, pour créer un disque à la fois moderne et intemporel, élargissant les influences tout en approfondissant le lien aux racines.